



" PARTIR "
Images & textes
2023
" Je rêvais que je revenais, plutôt que nous n'étions jamais partis, que les objets et les chaises étaient restés à la même place, que la table était mise, prête à nous accueillir autour du repas. Les enfants couraient dans le jardin en criant, faisant aboyer les chiens, le vent soulevaient les rideaux par les fenêtres ouvertes, l'ancienne horloge sonnait et la maison sentait son odeur habituelle de plâtre, de bois, de cire et de cuisine."
Cette série en textes et en images de portraits imaginaires numérotés de choses, de lieux ou d'animaux oubliés débute avec une femme aux yeux fermés. Elle est la seule présence humaine visuelle. Qui est-elle ?
Attendent-ils notre retour ou rêvent-ils d’autre chose ? Ils ont été utilisés, ils nous ont servi, puis ils ont été abandonnés, délaissés, rejetés, et ils se sont retrouvés fermés, oubliés, déclassés. Au travers de mes déambulations, je suis tombé sous le charme de ces animaux, de ces véhicules, de ces bâtiments, de ces constructions ou de ces lieux, qui, sous l’éclairage persistant de nos mémoires, continuent d’exister malgré nos départs, créant à notre insu une poésie de la disparition et de l’oubli.
A travers cette série en textes et en images de portraits imaginaires numérotés, sous des lumières fictionnelles créant des ambiances fantastiques, j’ai eu envie de leur redonner vie et de révéler les histoires qu’ils pourraient se raconter. En effet, tous ces animaux ont porté, nourrit, toutes ces constructions ont abrité, protégé, tous ces véhicules ont conduit, tracté… tous ces « outils »se sont mis un jour au service de nos volontés, de nos désirs, de nos aspirations ou même de nos rêves, et pourtant tous ont fini leurs courses un jour, quelque part, dans un délaissement à l’image de nos insatisfactions ou simplement de nos états d’âmes et ont pourtant continué leurs existences sans nous, à l’écart des passages et des regards, prolongeant leurs présences devenues apparemment futiles dans une sorte de résilience patiente vis à vis des humains qui les ont fait naître et comme témoins persistants d’une résistance à la vie après l’humanité, sont devenus par la même objets et source de poésie.
Dans une poétique de retour à la lumière, j’ai eu l’envie de rendre une sorte d’hommage à leurs existences, à leurs fonctions et d’établir un nouveau lien poétique entre eux et nous, pour nous amener à questionner nos consciences d’humains sur les concepts d’abandon, de rejet et nous rappeler que l’existence et la vie ne sont que des subjectivités poétiques.
" GO TO "
"I dreamt that I was coming back, or rather that we had never left, that the objects and chairs had remained in the same place, that the table was set, ready to welcome us for dinner. The children were running around the garden shouting, making the dogs bark, the wind was lifting the curtains through the open windows, the old clock was chiming and the house smelt of its usual smell of plaster, wood, wax and cooking."
This series of text and images of imaginary numbered portraits of forgotten things, places and animals begins with a woman with her eyes closed. She is the only visual human presence. Who is she?
Are they waiting for us to return or are they dreaming of something else? They have been used, they have served us, then they have been abandoned, neglected, rejected, and they have found themselves closed in, forgotten, downgraded. During my wanderings, I fell under the spell of these animals, vehicles, buildings, constructions and places, which, under the persistent light of our memories, continue to exist despite our departures, unwittingly creating a poetry of disappearance and oblivion.
Through this series of texts and images of imaginary numbered portraits, under fictional lights creating fantastic atmospheres, I wanted to bring them back to life and reveal the stories they could tell themselves. All these animals have carried and fed, all these buildings have sheltered and protected, all these vehicles have driven and pulled... all these ‘tools’ have one day been at the service of our wills, our desires, our aspirations or even our dreams, and yet all of them have ended up one day, somewhere, in a state of neglect that reflects our dissatisfactions or simply our states of mind, and yet have continued their lives without us, Out of sight and out of mind, prolonging their apparently futile presence in a kind of patient resilience to the humans who gave birth to them, and as persistent witnesses to a resistance to life after humanity, they have in the process become objects and sources of poetry.
In a poetic return to the light, I wanted to pay a kind of tribute to their existence and their functions, and to establish a new poetic link between them and us, to lead us to question our human consciences about the concepts of abandonment and rejection, and to remind us that existence and life are nothing more than poetic subjectivities.
© BERTRAND JACQUELINET 2025